In Defence of English Cooking

29 01 2009

Il fut un temps, vers 1984, où l’on a pris le grand, l’immense George Orwell (Blair de son vrai nom) pour un cochon. Comme chacun sait, tout est bon dans le cochon. De même, en 1984, tout était bon dans le George. Bon nombre de ses essais ont à cette date été publiés dans un recueil : The Penguin Essays of George Orwell (originellement publiés dans un plus sérieux recueil en 1968). Vous pouvez en voir un extrait ici. Ces précieux écrits ont été transportés dans le 21ème siècle quand Penguin, en 2005, a re-publié certains essais dans ce recueil bien nommé : In Defence of English Cooking.

En 1945, alors que l’Angleterre se remet de la Seconde Guerre Mondiale et que le rationnement est encore de rigueur, George décide d’allécher la population avec une description des mets les plus remarquables de la cuisine anglaise. Voyez comme la tâche est noble. À la lecture de ce texte, j’ai appris que George Orwell n’avait rien à envier à Stephen Clarke en terme de mauvaise foi. Et de fait, il me semble que ce texte mérite une (tentative de)  traduction, ici, sans plus attendre. J’ai laissé en anglais les termes culinaires pour l’essentiel intraduisibles, et j’ai essayé de compenser par l’ajout de liens hypertextes. Vous pourrez trouver la version originale ici.

Pour la défense de la Cuisine Anglaise

Nous avons entendu bon nombre de discours, ces dernières années, à propos du désir d’attirer des touristes étrangers dans ce pays. Il est bien connu que les deux pires défauts de l’Angleterre, du point de vue des visiteurs étrangers, sont la morosité de nos dimanches et la difficulté de s’offrir un verre.

Les deux sont dus à une minorité fanatique qui nécessitera une forte répression, et notamment une législation complète. Mais il y a un point sur lequel l’opinion publique pourrait amener à une amélioration rapide : j’entends la cuisine.

Il est communément considéré, même par les Anglais eux-mêmes, que la cuisine anglaise est la pire du monde. Elle est censée être non seulement inadéquate (pour de la nourriture), mais aussi sans originalité, et j’ai même lu récemment, dans un livre écrit par un écrivain français, la remarque : “Le meilleur de la cuisine anglaise, c’est, évidemment, la cuisine française”.

C’est tout simplement faux. Comme chacun ayant vécu à l’étranger le sait, il y a tout une quantité de délices qu’il est quasiment impossible de trouver en dehors des pays de langue anglaise. Aucun doute qu’il est possible d’en dresser une liste plus longue, mais voici certaines des choses que j’ai moi-même cherché dans des pays étrangers, et que je n’ai pues trouver.

Tout d’abord, le hareng fumé (kippers), le Yorkshire pudding, la Devonshire cream (ou clotted cream), les muffins et les crumpets. Ensuite une liste de desserts, qui serait interminable si je la donnais en entier : je vais sélectionner pour mention spéciale le Christmas pudding, la treacle tart et les chaussons aux pommes (apple dumplings). Ensuite, une liste presque aussi longue de gâteaux : par exemple, le dark plum cake [impossible de trouver une image pour celui là, et les recherches sur le Net pointent toutes vers le texte d’Orwell… l’aurait-il inventé, ou est-ce une invention qui n’a pas franchi le cap d’Internet ?] (comme celui qu’ils servaient chez Buzzard avant la guerre), les shortbreads et les saffron buns. Et aussi d’innombrables variétés de biscuits, qui existent, bien sûr, ailleurs, mais il est généralement admis qu’ils sont meilleurs et plus croustillants en Angleterre.

Ensuite il y a des diverses façons de cuire les pommes-de-terre qui sont spécifiques à notre pays. Où d’autre pouvez-vous trouver des “pommes-de-terres rôties sous le rôti”, ce qui est de loin la meilleure façon de les préparer ? Ou les délicieux gâteaux de pommes-de-terre que vous trouvez dans le nord de l’Angleterre ? Et il est bien meilleur de préparer les pommes-de terre nouvelles à l’anglaise — c’est-à-dire, bouillies avec de la menthe puis servies avec un peu de beurre fondu ou de margarine — que de les frire comme on le fait dans la plupart des pays.

Ensuite il y a les différentes sauces spécifiques à l’Angleterre. Par exemple, la sauce au pain, la sauce au réfort, la sauce à la menthe et la sauce à la pomme [de la purée de pomme] ; sans oublier la gelée de groseilles, qui est excellente avec le mouton comme avec le lièvre, et diverses sortes de pickles aigres-doux, que nous semblons avoir en plus grande quantité que la plupart des pays.

Quoi d’autre ? En dehors de ces îles [britanniques] je n’ai jamais vu de haggis, à part en boîte, ni de langoustine, ni de marmelade Oxford, ni plusieurs autres sortes de confiture (confiture de courge et la “gelée de ronce” [littéralement, il s’agit de confiture de mûre], par exemple), ni de saucisse ressemblant aux nôtres.

Ensuite il y les fromages anglais. Il ne sont pas nombreux, mais j’estime que le Stilton est le meilleur de la sorte dans le monde, avec le Wensleydale non loin derrière. Les pommes anglaises sont aussi de tout premier ordre, en particulier la Cox’s Orange Pippin.

Et enfin, j’aimerais dire un mot du pain anglais. Tout le pain est bon, des énormes pains juifs parfumés avec des graines de cumin aux pains de seigle russes qui ont la couleur de la mélasse. Et encore, s’il y quelque chose d’aussi bon que la partie tendre de la croûte d’un pain de cottage anglais (quand allons-nous voir de nouveau des pains de cottage ?), je n’en ai jamais entendu parler.

Il n’y a aucun doute qu’il est possible de trouver certaines des choses que j’ai nommées ci-dessus  en Europe continentale, exactement comme il est possible de trouver de la vodka ou des soupes au nid d’hirondelle à Londres. Mais elles sont natives de nos côtes, et dans d’immenses parties du monde, elle sont littéralement inconnues.

Au sud de, disons, Bruxelles, je ne peux pas imaginer que vous pourriez parvenir à dénicher un suet pudding [une sorte de christmas pudding]. En français, il n’y a même pas de mot pour traduire correctement ‘suet[graisse de boeuf ou de mouton]. Les Français n’utilisent aussi jamais de menthe dans la cuisine, et n’utilisent le cassis que comme base pour une boisson.

Il apparaît que nous n’avons pas de raison d’avoir honte de notre cuisine, pour ce qui concerne l’originalité ou pour ce qui concerne les ingrédients. Et pourtant, je dois admettre qu’il y a un hic du point de vue du visiteur étranger. C’est que vous ne trouvez pratiquement pas de bonne cuisine anglaise ailleurs que chez un particulier. Si vous voulez, disons, une bonne et riche part de Yorkshire pudding, vous avez plus de chance de la trouver dans la plus pauvre maison anglaise que dans un restaurant, où les visiteurs prennent nécessairement la plupart de leurs repas.

C’est un fait que les restaurants qui sont distinctement anglais et qui servent de la bonne nourriture sont très durs à trouver. Les pubs, c’est la règle, ne servent pas de nourriture à part des chips et de fades sandwiches. Les restaurants chers et les hôtels imitent presque tous la cuisine française et écrivent leur menu en français, alors que si vous voulez un bon repas bon marcher, vous graviterez naturellement près des restaurants grecs, italiens ou chinois. Il est peu probable que nous parvenions à attirer des touristes tant que l’Angleterre est perçue comme un pays de mauvaise nourriture et de lois incompréhensibles. Pour le moment, il n’y a pas grand chose que l’on puisse y faire, mais tôt ou tard le rationnement arrivera à sa fin, et alors il sera temps pour notre cuisine nationale de ressusciter. Ce n’est pas une loi de la nature que tous les restaurants en Angleterre soient soit étrangers soit mauvais, et le premier pas vers une amélioration sera que le public britannique adopte lui-même une attitude moins défaitiste.

Sans aucun doute, George Orwell a raison sur le fond : la cuisine anglaise a de bons côtés, mais elle est introuvable en dehors du cercle familiale, et les Anglais eux-mêmes ont une attitude si négative envers leur cuisine qu’il est difficile de ne pas les prendre au mot. Je vous proposerai donc prochainement ma propre version du plaidoyer pour la Cuisine Anglaise.





Les Anglais ne mangent pas d’escargots…

5 06 2008

… et ça se voit.

Invasion d\'escargots

Comme j’en avais marre de me faire manger le basilic, le coriandre et l’aneth que j’avais péniblement plantés, je suis parti à la chasse du gros mangeur. Et le gros mangeur, c’est l’escargot. Une horde. Jamais vu ça. En 20 min j’en ai attrapés plus d’une cinquantaine ! J’avoue que la chasse est facile, l’animal ne se caractérisant pas par sa vélocité.

Il y a tellement d’escargots qu’il faut nettoyer les murs de la maison où ils croient bon de faire leurs besoins… Je comprends mieux d’où vient la phobie de Patricia Highsmith pour les escargots.

Quoi qu’il en soit, à se nourrir d’escargots, on ne risque pas la famine en Angleterre. Je pensais lancer une entreprise d’importation de confit de canard français. Je vais plutôt lancer une entreprise d’exportation d’escargots anglais vers la France.

Plus de photos après la pause.

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“Booonne appétit’ !”

23 05 2008

J’ai toujours été fasciné par la façon dont le serveur prononçait “Booonne appétit’ !” dans cette scène mémorable de Brazil. Surtout qu’il vient de servir à ces messieurs dames des espèces de boules de glace saveur Magret de canard croustillant aux coings et sa floraison légère de petits légumes de saison. Miam !

Étant gosse, je ne voyais pas ça comme une vision futuriste des dérives de la mal-bouffe, mais comme la conception anglaise et contemporaine du dîner au restaurant. C’est donc avec une certaine inquiétude que j’ai posé mes bagages de l’autre côté de la Manche…

Foin de suspense, j’avais tout faux.

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